Pour que les femmes prennent pleinement leur place dans le monde de demain

TRIBUNE. L’émancipation des femmes ne concerne pas seulement les rues et les transports en commun, espace tangible et physique que nous connaissons au quotidien. Elle est tout autant à concevoir dans l’espace numérique, virtuel, intangible et pourtant si présent dans nos vies actuelles. Alors qu'au coin de la rue, les femmes sont interpellées constamment, des algorithmes, elles semblent disparaître totalement. (*) Par Valéria Faure-Muntian, députée de la Loire, membre de la Commission des Finances, de l'Economie générale et du Contrôle budgétaire, ainsi que près de trente personnalités.
(Crédits : DR)

Le Gouvernement a fait de la lutte pour l'égalité l'une des lignes directrices du quinquennat. Mes convictions et mon parcours me poussent à mener ce combat dans les secteurs du digital et de la cybersécurité. Ceci en regardant les inégalités créées dès la conception des services numériques et en s'intéressant aux secteurs d'avenir, afin que les femmes aient pleinement leur part à prendre dans nos sociétés actuelles et celles de demain.

Former les femmes aux métiers du numérique est un impératif

Depuis 2017, nous avons mené des actions fortes, à l'image de la loi renforçant la lutte contre les violences sexuelles et sexistes, adoptée en 2018, et plus récemment de la proposition visant à accélérer l'égalité économique et professionnelle actuellement débattue au Sénat. Dans le cadre de cette dernière, j'ai porté plusieurs amendements dont l'objectif était de garantir une meilleure intégration des femmes dans les filières et métiers des sciences, technologies, ingénieries et mathématiques (STEM) et plus particulièrement le digital et la cybersécurité.

Avant tout, les femmes doivent pouvoir se former, il est donc nécessaire d'améliorer leur accès aux métiers d'avenir. En 2020, parmi les dix métiers les plus recherchés en France, huit professions sont directement liées aux STEM. Les secteurs concernés regroupent autant des métiers relatifs à la protection des données qu'à la communication.

Néanmoins, les femmes y sont généralement sousreprésentées. Le numérique par exemple, ne compte pas plus de 23% de femmes alors que ce secteur manque de professionnels. De toute urgence, il nous faut sensibiliser au caractère intrinsèque du numérique sur le marché du travail.

Nous avons besoin de plus de femmes ingénieurs et à des postes dans l'Intelligence Artificielle (IA) afin d'établir une véritable diversité, mais le numérique n'est pas réservé aux spécialistes (ingénieurs, codeur, data scientist...). La collecte robotisée des déchets, l'enseignement à distance ou encore les ressources humaines mobilisant des procédés de recrutement automatisés, ne sont que quelques exemples montrant que l'acquisition de compétences numériques devient un prérequis inhérent à tout emploi.

Les femmes, un atout face à la pénurie de talents dans la cybersécurité

En outre, il nous faut renforcer la présence des femmes sur le marché de la cybersécurité. Les récentes attaques de systèmes informatiques ont confirmé que le numérique expose nos sociétés à un véritable risque systémique. Pour nous protéger, nous devons mieux nous former, car nous manquons d'experts en cybersécurité, en mesure de développer des applications plus avancées de l'IA qui détecteraient plus rapidement les attaques.

Néanmoins, nous devons aussi nous doter de professionnels capables de former nos entreprises aux bons gestes pour se prémunir et réagir face aux cyberattaques. Plus que jamais, les femmes doivent jouer un rôle clef dans ce secteur où elles n'occupent à ce jour que 24% des postes. Ce manque de représentation engendre de facto une absence de modèles et par conséquent une méconnaissance des opportunités dans la cybersécurité.

Briser le "gender gap" dans la conception des services numériques

Ainsi, nous devons briser cette chronologie néfaste et impulser une dynamique d'incitation à l'entrée des femmes dans les secteurs d'avenir via la contribution des organismes de formation.

Pour cela, les bases de données doivent être consolidées afin de connaître l'état de la représentation des femmes notamment dans les STEM. En parallèle, nous devons œuvrer à une meilleure information auprès des femmes sur les possibilités de formation dont elles disposent dans ces secteurs. Enfin, les femmes formées doivent pouvoir s'intégrer facilement sur le marché. Pour cela, ce dernier doit promouvoir des instruments éthiques et inclusifs.

Tout système numérique repose sur des algorithmes de fonctionnement. Cependant, ces procédés représentent aujourd'hui une véritable barrière pour les femmes : biais sexistes dans les bases de données, erreurs dans les statistiques... Une base de données faussée entraîne inévitablement une mauvaise sélection des CV et bien moins de chance pour une femme d'accéder à toute opportunité.

Pour briser ce gender gap, il nous faut d'abord rendre les métiers de l'IA plus attractifs pour les femmes afin qu'elles occupent une plus grande place dans la conception des services numériques. Ceci permettrait de corriger en partie le déséquilibre dans le volume d'information sur les femmes par rapport aux hommes.

Le numérique n'est pas qu'une affaire de spécialistes, il est un langage universel que les femmes se doivent de maîtriser au risque de perdre toute voix sur le marché. Ensemble, écrivons les métiers d'avenir, tels que ceux du numérique et de la cybersécurité, afin de les rendre plus attractifs pour les femmes et les jeunes générations.

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Députés : Graziella Melchior, Députée du Finistère ; Danièle Hérin, Députée de l'Aude ; Denis Masséglia, Député de Maine-et-Loire ; Amélia Lakrafi, Députée des Français de l'étranger ; Pierre-Alain Raphan, Député de l'Essone ; Marie Silin, Députée de Paris ; Virginie Duby-Muller, Députée de Haute-Savoie ; Jean-Michel Mis, Député de la Loire.

Société civile : Emmanuelle Larroque, directrice générale et fondatrice de Social Builder ; Sebastien Garnault, Cybertaskforce fondateur ; Laurence devillers rofesseur en Intelligence Artificielle au LIMSI-CNRS et membre du CNPEN ; Mélanie Benard-Crozat, rédactrice en chef de S&D Magazine ; Luigi Rebuffi, Secrétaire général de Women for Cyber ; Rayna Stamboliyska, Vice-présidente de Yes we hack ; Asma Mahlla, maîtresse de conférences à Sciences Po en économie numérique ; Claire Jacquemet, Directrice BU Services Finsecur ; Sandrine du Caurroy, Directrice commerciale de ALCEA ; Mélanie Dubus Directeur du marketing et du développement France d'Abloy Oy ; Isabelle Ogheard, Directrice Adjointe d'ELSIA ; Stéphanie TUCOULET, Secrétaire Générale de l'Alliance Nationale des Intégrateurs de Technologies ; Charlotte Wocik, Account Manager Secteur Défense de Capgemini ; Anett Madi-Nator, Présidente de Women For Cyber ; Gilles Dowek, informaticien, logicien, et philosophe ; Olga Kokshagina, chercheuse en management de l'innovation et membre du Conseil national du numérique ; Sophie Bodin, Présidente de Lilo ; Philippe Luc, président fondateur d'Anozrway ; Virginie Cadieu, Directrice du pôle Sécurité-Sûreté - Agora Directeurs Sécurité-Sûreté ; Arbia Smiti, présidente-déléguée générale et fondatrice de Rosaly ; Yann le Flo'ch, Président-directeur général de Staiwag, fondateur et président de Stairwage ; Anne Laure de La Rivière, associée d'Imajeur ; Jacques de La Rivière, CEO et co-fondateur de Gatewatcher ; Fabrice Koszyk, CEO de Serenicity ; Guillaume Viste, directeur général de CNPP cybersecurity.

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Commentaires 7
à écrit le 06/07/2021 à 15:02
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Les femmes du peuple travaillent depuis toujours (paysannes et ouvrières). C'était les riches bourgeoises qui ne faisaient rien. Maintenant les riches bourgeoises prennent des emplois bien rémunérés, et peuvent se payer le luxe d'une vie célibataire ...

à écrit le 06/07/2021 à 14:56
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Quelle démagogie ! ... "Nous avons besoin de plus de femmes ingénieurs"... non ! Nous avons besoin d'ingénieurs "tout court", compétents, qu'ils soient homme ou femme...

à écrit le 05/07/2021 à 21:34
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Les femmes sont depuis longtemps dans le "numérique" et elles sont plus douées pour le "multi-processing" que la plupart des hommes.

à écrit le 05/07/2021 à 21:06
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Merci Madame la députée, sachez que des femmes et des hommes du milieu de la cyber, membres du CEFCYS - Cercle des Femmes de la CyberSécurité (cefcys.fr) n'ont pas attendu votre tribune. Ils sont sur le terrain depuis 5 ans, à travers de l'accompagne...

à écrit le 05/07/2021 à 19:29
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Dans ma famille directe, 3 nanas travaillent en informatique, 3 garçons idem, ma soeur ainée et moi avons travaillé aux débuts de cette science. Aucune difficultée connue. Mais culture angevine, ça a toujours été les femmes qui commandent.

à écrit le 05/07/2021 à 11:50
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On fonctionne toujours de la même manière... l'homme a inventé la machine a laver pour soulager le travail des femmes et les femmes ont inventé....pour ainsi occuper le temps libéré!

à écrit le 05/07/2021 à 11:50
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La "lutte pour l'égalité" est une jolie appellation afin de compenser la désertion masculine d'un milieu de travail anéanti par le dumping social européen constitutionnalisé par un traité refusé en masse par les citoyens français via référendum mais ...

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